— Depuis Eusèbe de Césarée jusqu'à nos jours, les historiens n'ont cessé de porter un intérêt passionné à une communauté d'hommes et de femmes, que Philon le Juif nous montre établie sur une colline dominant le lac Mariout, non loin d'Alexandrie et dont il décrit la règle dans son Traité de la Vie contemplative ou des Suppliants. Témoigne de cet intérêt « l'énorme littérature qui se rapporte à ce traité » (É. Bréhier, Les idées religieuses et philosophiques de Philon d'Alexandrie, 3e éd., Paris, 1950, p. 321). Quand on inventorie cette littérature, il apparaît que l'on a vu dans ces hommes et ces femmes que Philon appelle Thérapeutes, Thérapeutrides (De Vita Contemplativa = DVC, 2), soit une utopie de l'ascétisme, créée par Philon ou par un autre auteur, soit les premiers chrétiens d'Alexandrie, convertis par l'évangéliste Marc, soit de proches parents, des « cousins germains » des Esséniens, soit enfin une communauté religieuse originale, qui « constitue un témoin particulièrement remarquable et intéressant de la vénération du judaïsme alexandrin à l'endroit du sabbat » (V. Nikiprowetzky, Le ‘De Vita Contemplativa' revisité, dans Sagesse et Religion, Colloque de Strasbourg, 20-22 octobre 1976, Paris, 1979, p. 124) ; pour l'inventaire de la littérature suscitée par le traité de Philon, voir J. Riaud, Les Thérapeutes d'Alexandrie dans la tradition et dans la recherche critique jusqu'aux découvertes de Qumrân, dans Aufstieg und Niedergang der Römischen Welt, II : Principat, Band 20 : Religion (Hellenistisches Judentum in römischer Zeit, ausgenommen Philon und Josephus, Berlin-New York, 1987, p. 1189-1295). Plutôt que de passer en revue et de discuter les diverses thèses évoquées ci-dessus, il paraît préférable d'attirer l'attention sur les renseignements que fournit le traité DVC, et de les éclairer en interrogeant l'oeuvre de Philon. Ces renseignements concernent les noms des membres de la communauté du lac Mariout, le régime contemplatif de celle-ci, et quelques-unes de ses particularités. Pour désigner ceux qu'il appelle « ceux des nôtres qui ont embrassé la vie...

[...]