— 1. Vie. — 2. Œuvre. — 3. Doctrine.

1. Vie.

— Alphonse Gratry est né à Lille, le 30 mars 1805. Son père a l'incroyance de l'époque. Sa mère, pieuse, marquera l'enfance de son fils d'une empreinte religieuse. Avec son père, intendant dans la grande armée de Napoléon, Alphonse passe plusieurs années en Allemagne, dont il connaîtra parfaitement la langue. De retour en France, il fait de brillantes études, couronnées par le grand prix de dissertation du concours général en 1824. Mais, au collège Henri IV, dans l'ambiance de la Restauration, qu'il a décrite dans ses Souvenirs, il perd la foi. Une « nuit », où il mesure la vanité de ses ambitions, lui rend le sens de Dieu. L'influence d'un surveillant, Latrèche, le ramène vers les sacrements. Voulant réconcilier la science et la foi, il décide, pour se donner une culture scientifique, de préparer en un an l'École Polytechnique. A force de volonté, il réussit (1825). A l'École, il trouve l'amitié de Jean-Jacques Ampère, et fait le rêve d'une cité idéale « dont tous les habitants s'aimaient » (Souvenirs). Deux des orientations de sa vie sont déjà dessinées, l'union de la science et de la foi, la préoccupation sociale. Renonçant à une carrière militaire, il est orienté par Martin de Noirlieu, aumônier du collège Henri IV, vers le groupe de Strasbourg (1828). Il y trouve Louise Humann, Louis Bautain, Théodore Ratisbonne, Henri de Bonnechose. L'influence de Louise Humann lui est précieuse, spirituellement et intellectuellement, mais il souffre de l'autoritarisme de Bautain. Il tente alors un noviciat chez les rédemptoristes du Bischenberg, mais la Révolution de 1830 les disperse. Gratry revient à Strasbourg. Il enseigne la rhétorique au petit séminaire, travaille énormément. Il est ordonné prêtre le 22 décembre 1832, après les études théologiques d'un autodidacte. En 1840, les difficultés entre Jean de Trévern, évêque de Strasbourg, et Bautain amènent la dispersion de la société naissante de Saint-Louis. Gratry accepte de Denis Affre, archevêque de Paris, la direction du collège Stanislas, à Paris. Bon pédagogue, il crée au collège les classes préparatoires aux grandes...

[...]