— Qu'est-ce que l'humour ? En quoi peut-il être utile dans la vie spirituelle ? Voilà les deux questions auxquelles on cherchera à donner des réponses. Sans doute serait-il plus exact de dire : des éléments de réponses, des pistes de réflexion. 1. Il serait vain de prétendre enfermer l'humour dans les concepts d'une définition et donc d'une théorie. Il n'est que de se souvenir des justes critiques qu'a suscitées l'essai que tenta Henri Bergson au sujet du rire. L'humour est encore plus nuancé, plus multiforme et moins cernable que ce dernier. D'ailleurs, ce qui est humoristique n'est-il pas variable selon les moeurs, les mentalités, les cultures, donc les époques ? Cela est fort probable. Par ailleurs, dans un contexte donné, ceux qui disposent d'humour l'expriment à leur manière, dans des formes et à propos de circonstances qui varient indéfiniment de l'un à l'autre. Voilà ce qui détermine le premier trait remarquable de l'humour : il est une manifestation éminemment personnelle de l'esprit humain individuel. L'éclat de rire spontané fuse devant le donné brut comme un réflexe ; le fou rire qui se déclenche dans une atmosphère trop tendue est une réaction de détente et de défense instinctive et incoercible. Le rire de gaieté souligne les plaisanteries, les côtés joyeux et comiques des individus, des rencontres, des circonstances de la vie ; il est léger, optimiste, imaginatif ; le rieur a tendance à se dissocier de ce dont il rit tout en attirant de son côté ceux qui l'entourent, à isoler l'objet de son rire ; il y mêle souvent une pointe de moquerie qui ne se veut pas méchante, mais qui peut être ressentie comme telle. L'ironie, elle, se veut méchante, destructrice, négatrice de la personne d'autrui 1189 qu'elle cherche à atteindre par-delà un travers, un ridicule, une action, une opinion, etc. L'humour n'est pas sans points de contact avec ces manifestations spécifiquement humaines que nous venons d'évoquer, mais il est autre et plus complexe. Plus réfléchi, plus serein que le rire de gaieté, il voit plus loin que le donné immédiat. Comme l'ironie et le rire, il prend de la distance par rapport à son objet, mais cette prise de recul n'est pas réaction de défense, refus de se laisser entamer...

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