— I. L'indifférence ignatienne. — II. L'indifférence aux 17e et 18e siècles.

I. INDIFFÉRENCE IGNATIENNE

1. Nouveauté de l'expression dans le langage ascétique.

— Ce sont les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola † 1556 qui ont fait la fortune du mot « indifférence », en le faisant passer du langage philosophique dans le langage de la spiritualité. Le fait peut sembler étrange de la part d'un homme qui n'avait fait aucune étude scolastique au moment où il commença à rédiger ses Exercices. Nous verrons, cependant, par l'étude des textes, comment cela s'explique. Constatons d'abord que le substantif « indifférence » ne se trouve ni dans les Exercices, ni dans les Constitutions de la compagnie de Jésus, ni, semble-t-il, dans aucun écrit de la main de saint Ignace. Toutefois, durant les dernières années de sa vie, quand le mot fut passé dans le langage quotidien des jésuites, il laisse son secrétaire Jean Polanco † 1576 l'employer dans ses lettres et lui-même en use aussi, au moins en conversation, comme le note, par exemple, le Directoire donné de vive voix au P. Juan Vitoria : au lieu de « second degré d'humilité », il dit « l'indifférence du second degré », voulant signifier que l'indifférence correspond au second degré d'humilité des Exercices 1689 (Directoria Exercitiorum spiritualium, MHSI, 1955, p. 50). Remarque importante, sur laquelle nous reviendrons. Partout ailleurs, saint Ignace n'emploie que l'adjectif « indifférent », quatre fois dans les Exercices, huit fois dans les Constitutions. Sauf au n. 170 des Exercices, où l'on parle en passant de « choses indifférentes », il s'agit toujours de qualifier la volonté de l'homme : être, se trouver, se faire indifférent (Exercices, n. 23, 157, 170, 179 ; — Constitutions, n. 15, 33, 72 deux fois, 130 deux fois, 132, 633). Ceux qui ont étudié les étapes de rédaction des...

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