— Vue, intelligence, savoir, saisie, ces mots ont toujours fait partie du vocabulaire chrétien concernant notre connaissance des choses divines, parce qu'ils sont déjà bibliques. Les apôtres ont vu la gloire du Fils de Dieu (Jean 1, 14). Personne n'a jamais vu Dieu (1, 18), mais voyant Jésus, on voit le Père (14, 19). Paul a vu le Christ ressuscité, vivant, et il l'a confessé comme son Seigneur. « Nous-mêmes avons entendu et nous savons que celui-là est vraiment le sauveur du monde », disent les samaritains (4, 42). Ces mots voisinent sans difficulté avec la terminologie qui caractérise la foi : croire, faire 1832 crédit, se plier à l'obéissance de la foi, accepter les réalités invisibles « comme si » on les voyait (Héb. 11, 27). Bien loin d'être ressentie comme une contradiction, la vive opposition de certains de ces termes apparaît comme le signe de la richesse et de la singularité de ce qu'est pour le chrétien et de ce que peut devenir au cours de sa vie la connaissance du mystère de Dieu révélé en Jésus-Christ. Elle montre que cette connaissance ne se laisse réduire à aucun modèle de savoir humain ou même de croyance religieuse. Dans la spiritualité chrétienne, l'insistance se fera tantôt sur un aspect, tantôt sur l'autre : ou bien la foi nue, dépouillée, obscure, de ceux qui n'ont pas eu besoin de voir pour croire et qui refusent de rechercher quelque appui en dehors de la foi même, ou bien la foi éclairée de celui qui pèse toutes ses raisons de croire, la foi lumineuse qui permet de discerner la vérité du Seigneur et donne les « yeux illuminés du coeur » (Éph. 1, 18), la foi par laquelle « on comprend que les mondes ont été formés par une parole de Dieu » (Héb. 11, 3). Et, pour unir les deux, l'affirmation de Pierre (Jean 6, 69) : « Pour nous, nous avons cru (πεπιστεύϰαμεν) et nous avons reconnu (ἐγνώϰαμεν) que tu es le Saint de Dieu ». Bien des distinctions interviendront, entre la vue qui précède, au moins logiquement, la foi et la vue à laquelle tend le croyant, entre le développement d'une intelligence de la foi par réflexion rationnelle et celui d'une intelligence plus haute reçue de l'Esprit. Elles...

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