— 1. Légendes. — 2. Révélation de la Face de Yahvé. — 3. Les spirituels. — 4. Perspectives. De toutes les dévotions, lesquelles consistent, on le sait, à se vouer totalement à Dieu par la médiation de la sainte Humanité du Christ, de ses sacrements ou de ses ministres, la dévotion à la sainte Face est la plus noble. Elle a suscité en l'âme religieuse trois comportements : 1. L'affabulation, la pensée mythique, gémissement de la créature essayant d'exprimer et de satisfaire dans les jeux de l'imagination ses aspirations profondes ; 2. La foi ou adhésion de l'esprit à la Vérité divine, révélée aux hommes dans un dépouillement et une simplicité toute divine ; 3. Dans l'entre-deux, les effusions des spirituels, forts d'une certaine expérience, utilisant parfois le mythe comme moyen d'expression, mais toujours le surmontant. Il est urgent de ne pas mêler ces trois registres, aussi distincts que continus, et de ne pas noyer dans la puérilité des légendes et des mythes la dévotion à la sainte Face. Explorons d'abord le bas-niveau, le sous-sol religieux, on veut dire les légendes.

1. Les légendes.

— Les grecs honoraient des images venues du ciel. Les chrétiens honorèrent des images acheiropoiètes (non faites de main d'homme). Les plus fameuses furent celle d'Abgar et celle de Véronique. La légende d'Abgar, que relatent les Actes syriaques de Thaddée (3e siècle ; cf Eusèbe, Histoire ecclésiastique I, 13, PG 20, 120-129), a pour intention d'accréditer la haute antiquité de l'Église d'Édesse. Elle confond avec Abgar IX, qui régna de 179 à 216 et qui fut le premier roi chrétien d'Édesse, Abgar le Noir, contemporain de Jésus. Le roi est malade ; il fait appel au grand thaumaturge ; des lettres s'échangent ; Jésus promet l'envoi d'un disciple qui guérira le roi ; Thaddée accomplira le prodige. Il n'est pas encore question dans ce récit d'image miraculeuse ; elle apparaît dans une nouvelle recension des Actes de Thaddée : la Doctrine d'Addaï. L'état dernier de la légende montre l'envoyé...

[...]