Auteur : J. DE GUIBERT.
 
Tome 1 - Colonne 0
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Titre de l'article : ABNÉGATION (DÉPOUILLEMENT, RENONCEMENT).
Début de l'article :
— Dans le langage courant, « montrer de l'abnégation » c'est s'oublier soi-même, ne pas tenir compte de ses propres goûts, de ses propres intérêts, sacrifier pour les autres, pour une cause, ses propres avantages, son repos, sa vie même. Usage que la Société française de philosophie résume ainsi dans son Vocabulaire de la Philosophie (Paris, 1926, t. I, p. 2) : « Renoncement de l'homme à tout ce qu'il y a d'égoïste, et même d'individuel, dans ses désirs » ; « degré de désintéressement ou expression du désintéressement qui dépassent le simple oubli de soi », notait M. Belot à propos de cette définition ; et M. M. Blondel ajoutait fort justement que cette notion, entrée aujourd'hui dans le langage courant, a son origine dans le vocabulaire de l'ascétisme chrétien (ibid.) : l'usage profane actuel de ce mot dérive manifestement de l'Évangile auquel la spiritualité chrétienne a emprunté mot et notion. Nous pouvons nous contenter pour le moment de cette définition sommaire : après avoir étudié les fondements scripturaires et traditionnels de la doctrine de l'abnégation, nous pourrons mieux donner une définition exacte de cette disposition, et la distinguer avec toute la précision possible des notions voisines avec lesquelles elle se croise continuellement chez les auteurs spirituels : renoncement, dépouillement, nudité spirituelle, détachement, oubli de soi, mortification, humilité… I. Fondements scripturaires de l'abnégation chrétienne ; II. Tradition patristique, médiévale, moderne ; III. Notion précise et doctrine de l'abnégation.
I. FONDEMENTS SCRIPTURAIRES DE L'ABNÉGATION CHRÉTIENNE.
La doctrine chrétienne de l'abnégation a son point de départ essentiel dans les paroles du Christ, que nous ont conservées, en termes substantiellement identiques, les trois synoptiques : « Si quis vult post me venire, abneget semetipsum, et tollat crucem suam (Luc, + quotidie), et sequatur me. Qui enim voluerit animam suam salvam facere, perdet eam : qui autem perdiderit animam suam propter me, inveniet eam. Quid enim prodest homini, si mundum universum lucretur, animae vero suae detrimentum...

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