— 1. Vie. — 2. Œuvres. — 3. Spiritualité.

1. VIE.

— Toute l'existence d'Emmanuel Mounier n'est que l'histoire d'une vocation : porter de sa foi chrétienne un témoignage que tous les hommes de son temps fussent en mesure de comprendre. Né le 1er avril 1905 à Grenoble, où son père était pharmacien, « il y vécut jusqu'à dix-neuf ans, entouré de ses parents, grands-parents et de sa soeur aînée, Madeleine ». Cette formule d'une notice publiée au lendemain de sa mort (cf Œuvres, t. 4, p. 411) exprime bien ce que furent son enfance et sa jeunesse tranquilles. « Il m'est toujours resté de l'enfance tout le contraire d'un souvenir déprimant et une sorte d'exaltation de vie au bord de l'automne ; c'est la saison où le travail reprenait, avec l'attrait d'une année nouvelle et de découvertes nouvelles » (lettre de 1942, p. 413). Ici s'exprime le prodigieux travailleur que fut Mounier ; c'est à l'excès de travail qu'il a finalement succombé. Il écrivait aussi en 1933, peu après la fondation d'Esprit : « Ma vie est tissée de longs fils… Eh bien ! oui, je crois que la fidélité est une de mes dimensions intérieures. De longues fibres de fidélité m'apportent aujourd'hui, aussi neufs, aussi dociles qu'au premier jour, des états inchangés de mon enfance » (p. 11). 1810 Solidement implanté dans une tradition qu'il n'aura jamais la tentation de renier, Mounier va pourtant se lancer dans une grande aventure, et c'est ici qu'apparaît très clairement l'appel, la vocation. Ayant dépassé de peu vingt-cinq ans, agrégé de philosophie, professeur au lycée de Saint-Omer, disciple de Jacques Maritain après avoir été un moment entrainé par l'éloquence de Jacques Chevalier, qui initiait la jeunesse grenobloise à Bergson, qu'avait-il à faire d'autre que de poursuivre paisiblement une carrière universitaire qui l'aurait conduit pas à pas aux honneurs de la Sorbonne et de l'Institut ? Au lieu de cela il fonde une revue, du même mouvement qu'en d'autres temps on fondait un ordre religieux. L'heure était particulièrement sombre....

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